16 septembre 2013

Cohabitation à Rome, ou l'auberge équatorienne


Comme j'avais un appartement à Rome pour mai, j'ai décidé d'y rester tout le mois, même sans travail. Ah oui, je ne vous ai pas raconté mon énorme coup de chance. Il s'est avéré que mon pote rentier Roberto (pseudonyme), rencontré à Bonn où nous habitions à la même période, était justement à Rome pour s'occuper de ses apparts le jour où j'ai trouvé du travail. Et comme le hasard fait bien les choses, il avait justement une chambre libre pour moi ! Premier mois gratuit à l'essai !
Ne vous emballez pas... si vous espériez un loft dans le Trastevere, c'est loupé. Non, simplement une chambre dans un quartier moche mais pas dangereux à 10 mn du centre en métro. Pas besoin d'aller jusqu'à Pise : mon immeuble penchait encore plus que la tour, à cause du terrain trop meuble, si j'ai bien compris. Il suffisait de poser une tasse de café sur la table pour s'en apercevoir : le liquide était de travers par rapport à la tasse ! Aussi étonnant, le test du flacon de déo, qui, simplement posé par terre, roulait à toute vitesse de l'autre côté de la chambre. Et je ne parle pas des portes qui ne tenaient pas ouvertes ou fermées.
Officiellement, j'étais censée partager l'appartement avec une jeune Equatorienne et son bébé d'un mois (voilà pourquoi Roberto n'arrivait pas à la louer). Officieusement, c'est avec une famille entière que j'ai cohabité ! Aux deux que je viens de citer, s'ajoutaient le petit frère de 25 ans à peu près, et la maman ! Tous dans une chambre ! Ça aurait pu être un bordel sans nom, mais ça s'est étonnamment bien passé. Une hygiène irréprochable (je croyais que la Minooch était maniaque...), et aucun bruit ! Je n'ai pas entendu pleurer le bébé une seule fois, c'était presque suspect, je me demande s'il n'était pas sourd-muet ou quelque chose comme ça.
Tous les matins au petit déj je pouvais me servir dans le grand saladier de dulce de leche fait par la mamma plusieurs fois par semaine. Pas pareil que la confiture de lait (on fait souvent l'amalgame), moins écoeurant, moins sucré. Je fermais les yeux et me retrouvais en Amérique du Sud !
Bref, tout ceci était sociologiquement intéressant, mais c'était pas la vie dont je rêvais. Je crois que les grandes villes, ce n'est pas fait pour moi. Si je ne peux pas me déplacer à vélo, je suis malheureuse... et à Rome, à moins d'être kamikaze (ou du moins d'habiter dans le centre), c'est pas possible.
Alors oui, il y a le métro, mais... seulement deux lignes sur une ville qui fait 12 fois la superficie de Paris (intra muros, entendons-nous bien) ! Elles se croisent une fois à la gare centrale, et basta.


Moi j'étais presque en bas de la ligne bleue.
Bien sûr, il y a le bus, mais il est soumis aux aléas de la circulation (qui est, ai-je besoin de le préciser, épouvantable).
Et une fois par mois en moyenne, à quoi a-t-on droit ? Allez, un indice : on a la même chose en France... la grève !!! Evidemment, pile-poil le jour où je rentrais d'excursion toute crado avec mon gros sac à dos, ne rêvant que d'une bonne douche et de mon lit. J'ai dû attendre la fin de la grève (4 ou 5h, c'est long).


09 septembre 2013

Travail à la romaine (2)

J'étais à deux doigts de partir en courant après la formation du lundi. J'ai appris qu'il s'agissait de cours particuliers uniquement, 6h de 60mn à la suite sans pause, et surtout, et surtout, sans préparation aucune !! L'élève débarque avec son petit livret dans lequel est écrit ce qu'il a fait la fois précédente (il y a au moins 4 ou 5 profs de français différents), et hop, tu dois continuer à la page 184 du bouquin que tu ne connais pas, vu que c'est une méthode italienne à la con, bien rébarbative en plus. Pour le français passe encore (mais je déteste le fait de ne pas être préparée, surtout quand une petite morveuse de 15 ans me demande le sens de « déréliction » !), mais pour l'anglais.... même s'ils ne me donnaient que des « beginners » et « pre-intermediate », vas-y coco pour expliquer des pages du livre que tu n'as pas pu étudier avant. J'ai failli perdre tous mes moyens pendant la 1ere heure avec une débutante. Selon les consignes j 'ai dû lui mentir (car elle m'a posé la question) et dire que mon père était anglais ! (sorry Pinooch) Quelle honte (pour l'école qui se targue de n'engager que des locuteurs natifs, pas pour moi). Le chef est venu me voir après, je lui ai confié que je ne me sentais pas capable d'enseigner l'anglais à un niveau plus haut que débutant, et il a dit qu'on allait laisser tomber l'anglais dans ce cas (sage décision), mais que du coup j'aurais moins d'heures et des horaires plus « flexibles » qu'on me communiquerait seulement la veille.
En général je bossais de 14 à 19h, et je dois avouer que c'était beaucoup moins fatigant que je ne le craignais (à part le samedi matin où c'était très dur de commencer à 9h...). Les élèves étaient souvent fort sympathiques, c'était super intéressant de discuter avec eux, j'ai appris un tas de choses, surtout sur la langue italienne. Je me gênais pas pour leur poser des questions à ce sujet, prenant comme excuse l'approche comparative des 2 langues. Et puis j'ai vu défiler toute une galerie de personnages hétéroclites, ça allait du prêtre polonais (quand je travaillais au siège près du Vatican) à la jeune fille de bonne famille plurilingue (ça changeait des Italiens « classiques »!), en passant par le cadre over-booké et la retraitée trop mignonne.
Le seul stress, c'était les heures de « full immersion » auxquelles je n'avais pas du tout été formée : tu te retrouves avec 2 ou 3 élèves dont le niveau peut être hétéroclite (possible d'avoir un A1, un A2 et un B2 !), et tu dois improviser quelque chose. Un cauchemar didactique.
Bref, le travail en soi n'était pas désagréable, mais c'était de l'exploitation. Un élève qui venait depuis 5 ans m'a dit que les profs restaient rarement plus d'un an, et j'ai compris pourquoi quand j'ai enfin réussi à aller déjeuner avec 2 collègues. Ils ne te font signer le contrat (CDD de 6 mois renouvelable) qu'après 2 ou 3 mois de travail au noir, et quel contrat... 1300 euros nets par mois pour 36h par semaine comme je disais précédemment, ils appellent ça contrat fixe pour justifier la basse rémunération horaire, mais ce n'est rien de plus que des vacations assurées : pas de vacances, et t'es pas payée si t'es malade.
De plus, je n'avais pas franchement l'impression de coller à l'image de l'école. Le directeur voulait du personnel « jeune, ouvert et sympathique ». Résultat : un microcosme d'excitées extraverties avec des grands sourires faux-cul et des tonnes de fond de teint, perchées sur des talons de 10cm et moulées dans des pantalons en léopard et des petits hauts à 2 sous bariolés. Bienvenue à Pouffeland (OK, j'exagère un peu, c'est vrai à 100% pour les standardistes mais il y avait des exceptions parmi les profs).
Je comptais essayer de tenir un mois puis dire « ciao », mais ils m'ont devancée les bougres. Au bout de 8 jours, ils m'ont congédiée (et payée, ouf) sous prétexte qu'ils n'avaient pas assez d'heures de français pour moi (c'est vrai qu'une autre prof de français m'avait dit que certains jours, elle n'enseignait que l'anglais...), "quel dommage parce qu'on a eu des bons échos des élèves, on voudrait te garder mais le fait que tu ne puisses/veuilles pas enseigner l'anglais est problématique, on te rappellera quand on aura trouvé une solution" (j'attends toujours).
Me voilà riche... d'une nouvelle expérience.


04 septembre 2013

Travail à la romaine (1)

Qui a dit que c'était impossible de trouver du travail à Rome ?
Avant de répondre à cette question qui n'en est pas une, faudrait que je vous explique ce que je fichais dans la cité éternelle. Après quelques jours à Bologne, je me suis incrustée dans la voiture de mon gentil couch surfeur (que nous nommerons Lapinou pour respecter l'anonymat) qui descendait à Rome pour le travail. Dans ma tête, c'était « cool, je me rapproche un peu plus de Naples et de la Sicile », soleil, vacances, glaces, voyage, avant de me mettre sérieusement à chercher un travail. C'était sans compter le pragmatisme engagé du Lapinou :
-Prends tes CV, on va passer dans les écoles de langues.
-Ouais... euh... plus tard ? On va au salon de la glace ? (yeux brillants, langue qui pend et bave qui dégouline)
Ça s'est terminé par un compromis : deux écoles de langues qui n'étaient pas loin, puis glace.
Il n'a pas été déçu l'animal : il m'a attendue une demi-heure dans la voiture (garé en double file gnarf gnarf gnarf, à la romaine quoi) devant la première école.
Le truc surréaliste : je sonne, c'étaient comme s'ils m'attendaient, une espèce de géante blondasse hautaine et stressée me dit « asseyez-vous le directeur va vous recevoir », entretien d'embauche direct, et même in English please (« but you speakeu very welleu! » avec un accent italiano à tagliare al coltello), parce que tenez-vous bien, ils voulaient que je teach English aussi !!! En fait ils venaient de mettre une annonce et ils croyaient que je venais pour ça.
Les conditions : contrat fixe, 1300 euros nets pour... 6h de cours par jour, du lundi au samedi, soit 36h par semaine (=8,50 de l'heure, mais ça je ne l'ai réalisé que plus tard).
J'étais pas très emballée, mais eux si, ils m'ont rappelée le lendemain (samedi !), ils voulaient que je repasse le lundi pour tout m'expliquer et que je commence à bosser dès le mardi.

 Avant l'effort, le réconfort







01 septembre 2013

Le perché du come

1er septembre 2013. Cela fait un peu plus de quatre mois que je suis arivée en Italie. Mon plus long séjour au pays del gelato jusqu'ici (avec une petite pause teutonne en août). Et cette fois-ci, c'est pas de la rigolade. Finis les séjours à la ferme, le désherbage et la traite des chèvres. Je ne suis pas venue avec mes pantalons troués et ma bêche, mais armée de CV et lettres de motivation. Après 10 ans d'Allemagne, je me suis dit assez, basta, genug, j'ai pris mes cliques et mes claques et les choses en main, et c'est ainsi que je suis arrivée à Bologne.



Pourquoi Bologne ? C'est le point de départ d'un itinéraire minutieusement élaboré. Non je déconne. C'était juste la destination la moins chère en avion à partir de Bonn, vu que je m'y suis prise un peu au dernier moment pour l'achat du billet. Voilà tout. Comme je comptais faire le tour de plus ou moins toutes les grandes villes d'Italie (à part le nord-nord parce que zut, si je quitte ma chère Allemagne c'est pas pour retrouver le même climat...) avec une préférence pour le sud, ça ne changeait pas grand-chose que je commence par Bologne ou Bari.
Et puis avec l'expérience, j'ai appris à ne plus faire de projets trop précis, parce que de toute façon, jamais rien ne se passe comme on l'avait prévu. Autant se laisser porter par le courant en donnant juste un coup de pagaie de tenmps en temps.
Avant de partir j'avais envoyé 12 candidatures par mail aux alliances et instituts français d'Italie qui m'intéressaient (au cas où des inconnus liraient cet article : je suis prof de français pour étrangers), résultats 3 réponses, toutes négatives : 2 « non merci notre équipe pédagogique est au complet » et un « pas maintenant mais peut-être plus tard ». Pas franchement encourageant, mais je me suis dit qu'en me présentant en personne j'aurais peut-être un peu plus de chance.
Vous verrez le résultat dans les posts qui vont suivre...